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8 janvier 2018

Jugement du 23 février 2017 - Commune d'Aimargues

Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 23 septembre 2014 et le 2 juin 2015, la commune d’Aimargues, représentée par Me Margall, demande au tribunal :

1°) de condamner le préfet du Gard à lui verser une somme de 75 609 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 19 mai 2011 ;

2°) de mettre à la charge du préfet du Gard la somme de 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l’Etat doit réparer la perte des sommes résultant de l’erreur commise par ses services du fait du prononcé d’un dégrèvement injustifié des sommes initialement réclamées à la SCI Elisabeth au titre de la taxe locale d’équipement ;

- la commune n’a commis de son côté aucune faute.

 Par un mémoire en défense, enregistré le 6 mai 2015, le préfet du Gard conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que la commune s’est rendue coupable d’une absence fautive de coopération dans l’établissement de l’assiette de la taxe locale d’équipement ; qu’elle a par suite pris une part importante sinon totale de responsabilité dans le dégrèvement inopportun en cause.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

 

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

-   le rapport de M. Parisien, premier conseiller ;

-   les conclusions de M. L’hôte, rapporteur public ;

-   et les observations de Me Liegeois pour la commune d’Aimargues.

 

1. Considérant que la SCI Elisabeth a obtenu un permis de construire modificatif le 16 septembre 2004 délivré par la commune d’Aimargues ; que ce permis était assorti d’une taxe locale d’équipement d’un montant de 75 609 euros ; que, suite à une demande formulée par l’intéressée le 21 mai 2009, le préfet du Gard a accordé à la SCI Elisabeth le 24 juin 2009 le dégrèvement total de la taxe locale d’équipement qui lui était réclamée ; que, par une requête du 23 septembre 2014, la commune d’Aimargues demande la condamnation du préfet du Gard à lui verser une somme de 75 609 euros, correspondant au dégrèvement accordé à tort, assortie des intérêts au taux légal à compter du 19 mai 2011 ;

Sur la responsabilité :

2. Considérant qu’une faute commise par l’administration lors de l’exécution d’opérations se rattachant aux procédures d’établissement, de dégrèvement ou de recouvrement de la taxe locale d’équipement est de nature à engager la responsabilité de l'Etat à l'égard d’une commune si elle lui a directement causé un préjudice ;

3. Considérant qu’il est constant que l’administration a accordé à tort à la SCI Elisabeth le dégrèvement de la somme de 75 609 euros au titre de la taxe locale d’équipement dont elle était redevable, en se fondant par erreur sur les dispositions de l’article 1585 C du CGI, alors qu’en sa qualité de lotisseur, elle était assujettie au paiement de ladite taxe ; que cette faute, commise par l’administration lors de l’exécution de ces opérations se rattachant aux procédures de dégrèvement de l’impôt, est de nature à engager la responsabilité de l’Etat dès lors qu’elle a directement causé à la commune un préjudice ;

Sur la faute de la commune :

4. Considérant que le préfet du Gard fait valoir que ses services n’auraient pas pu obtenir de renseignements fiables de la part de la commune sur la nature de la structure juridique dans laquelle se situait le lotissement communautaire où a été délivré le permis de construire de la SCI Elisabeth ; que, toutefois, il se borne à produire à l’appui de ses dires une télécopie du service urbanisme de la commune d’Aimargues du 27 septembre 2010, faisant référence à une conversation téléphonique du même jour avec les services de la préfecture du Gard, et s’interrogeant sur le motif de la dénomination par le terme « zone d’aménagement concerté (ZAC) » du lotissement en cause ; qu’eu égard, en tout état de cause, à la date de ces échanges, postérieurs de plus d’un an à la décision de dégrèvement en cause, et en l’absence de toute autre document, l’existence d’une faute de la commune susceptible d’atténuer la responsabilité de l’Etat ne résulte pas de l’instruction ;

Sur le préjudice :

5. Considérant que le préjudice subi par une commune, en raison de la faute commise par l’administration suite au dégrèvement injustifié de la taxe locale d’équipement dont était redevable la SCI Elisabeth, est constitué des conséquences matérielles de la décision prise par l'administration ; qu’au cas d’espèce, l’insuffisance des recettes de la commune s’élève à 75 609 euros, correspondant au montant de la taxe dégrevée à tort ;

6. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède qu’il y a lieu, de fixer à 75 609  euros le montant de l’indemnité due par l'Etat à  la commune d’Aimargues ;

Sur les intérêts et leur capitalisation :

7. Considérant que la commune a droit aux intérêts des sommes qui lui sont dues à compter du 23 septembre 2014, date à laquelle elle a saisi le tribunal administratif ; que la capitalisation des intérêts a été demandée le 23 septembre 2014 ; qu’il y a lieu de faire droit à cette demande à compter du 23 septembre 2015, date à laquelle était due, pour la première fois, une année d’intérêts, ainsi qu’à chaque échéance annuelle à compter de cette date ;

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative

8. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros que la commune d’Aimargues demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

 

D E C I D E :

Article 1er : L'Etat est condamné à verser à la commune d’Aimargues une somme de 75 609 euros. Elle portera intérêt au taux légal à compter du 23 septembre 2014. Les intérêts échus à la date du 23 septembre 2015 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 2 : L'Etat versera à la commune d’Aimargues une somme de 1 200 euros en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la commune d’Aimargues est rejeté.

Article 4 : Le présent jugement sera notifié à la commune d’Aimargues et au préfet du Gard.

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